L’obligation de rester muni de son téléphone portable pro transforme- t-elle une pause en temps de travail ?

Les litiges relatifs au paiement des temps de pause sont fréquents. Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 2 juin 2021, des salariées demandaient des rappels de salaire pour des temps de pause pendant lesquels elles devaient rester joignables à tout moment.

 

Pause et temps de travail effectif : rappel

La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles (c. trav. art. L. 3121-1).
Une pause ne constitue donc pas du temps de travail effectif, sauf si les critères de ce dernier sont réunis (c. trav. art. L. 3121-2).

À cet égard, il a par exemple été jugé que le seul fait que le salarié doive porter sa tenue de travail durant sa pause ne suffit pas à considérer que ce temps constitue un temps de travail effectif (cass. soc. 15 octobre 2014, n° 13-16645 D).

 

L’affaire : une pause avec obligation de se munir de son portable professionnel

Plusieurs salariées exerçant des fonctions d’agent d’encadrement qualité, statut non cadre, avaient saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.
Parmi leurs griefs, elles sollicitaient la requalification de temps de pause en temps travaillé rémunéré.
La pause en question était une pause obligatoire et badgée de 30 minutes, qui avait été instaurée au milieu des séquences de travail, en remplacement des « micro pauses » qui existaient auparavant, de façon à éviter que les salariées dépassent 6 heures de travail continu.

 

Pour la Cour de cassation, l’obligation d’être joignable à tout moment ne suffit pas à requalifier la pause.

Les juges d’appel avaient donné gain de cause aux salariées. Pour ce faire, ils avaient relevé que l’employeur exigeait de ses salariées qu’elles conservent leur téléphone mobile professionnel dans tous leurs déplacements internes sur le site « afin d’être joignables à tout moment », y compris en cas de sortie de poste, pour pouvoir répondre à une information urgente à transmettre au transporteur pour les livraisons.
Les juges avaient déduit de ces éléments que les salariées devaient rester constamment à la disposition de leur employeur et se conformer à ses directives, qu’elles ne pouvaient donc vaquer librement à leurs occupations personnelles y compris pendant leurs pauses, de sorte que celles-ci, même lorsqu’elles étaient badgées, constituaient un temps de travail effectif.
Insuffisant pour la Cour de cassation. Celle-ci estime que les éléments soulignés par les juges d’appel ne permettaient pas de démontrer en quoi les salariées étaient, durant les temps de pause, à la disposition de leur employeur et devaient se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
Par conséquent, l’affaire devra faire l’objet d’une nouvelle audience.

Cass. soc. 2 juin 2021, n° 19-15468 D

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